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SOCIÉTÉ

 


27/07/04 Daniel Surprenant CARTES

L’Architecture de la culture

Un concept large

Le concept de culture est tellement vaste, qu’on peut se demander parfois s’il est pertinent au plan conceptuel. A partir du moment où on postule que la culture est tout ce que produit l’homme, tout ce qui n’est pas de l’ordre de la nature (encore que la représentation qu’on en a est aussi culturelle), elle couvre un champs très vaste comme l’a défini l’anthropologue E.B. Tylor, à savoir tout complexe englobant les connaissances, les croyances, l’art, les lois, les coutumes et les autres capacités ou habitudes acquises par l’homme en tant que membre de la société. On peut se demander si à vouloir trop expliquer, finalement il n’explique plus rien. Comme dit le proverbe, qui trop embrasse mal étreint.

En réalité, se pose un problème courant dans les sciences sociales, celui de l’articulation entre les niveaux de réalité. Déjà Marx avait posé la difficile question de l’articulation entre l’instance économique et le politique, entre la superstructure et l’infrastructure, bref entre les grands déterminants sociaux et les pratiques concrètes. Certains en ont déduit de manière déterministe que l’économie en dernière instance déterminait de manière mécanique le politique, le social et le culturel. Derrière toute pratique sociale se dissimulaient nécessairement les rapports de classe.

L’anthropologie n’a pas échappé à ce phénomène avec le culturalisme qui prétendait tout ramener à la culture appréhendée chez Durkheim comme un phénomène extérieur transcendant les individus. C’est la conception métaphysique du social. Comment alors expliquer le changement, l’histoire ? Durkheim souligne pourtant lui-même la complexité des rapports entre le niveau individuel et collectif. P. Steiner étudiant Durkheim note que chez lui  les représentations collectives sont dans un premier temps fonction des bases morphologiques de la société mais ajoute que des représentations du deuxième degré faisant fond sur les premières se développent aussitôt. Ces représentations de deuxième ordre sont dotées d’une « autonomie relative » vis-à-vis du substrat social. Comme le disait Simmel, les formes sont des habitacles de la vie créatrice qui finissent par conquérir leur propre logique et une indépendance à l’égard de ceux qui les ont produites. Il suggère donc que les représentations peuvent finir par avoir une certaine autonomie par rapport à la structure sociale qui leur a donné naissance. Elles peuvent donc continuer à s’imposer alors que la structure sociale qui les a produite a disparu. On a vu que dans certaines circonstances historiques, elles peuvent même être mobilisées par certains groupes sociaux qui vont cependant les retravailler et les déformer. On connaît  l’importance que peut avoir le révisionnisme.

Niveaux et décalages culturels

Il vaut ici la peine de citer à nouveau Simmel pour qui il existe une réactivité permanente entre l’être et la société, tension entre le social et la personnalité. Là se trouve le paradoxe du social : Les hommes ont besoin de formes pour vivre mais l’individu lutte de façon permanente contre la société. Il y a tension continuelle entre le dedans et le dehors.

Nous connaissons tous la célèbre critique de R. Aron faite au marxisme orthodoxe comme quoi dans certains cas, le politique loin d’être mécaniquement subordonné aux rapports de production, peut parfois devenir l’instance dominante agissant en retour sur les structures économiques. Il est vrai que Marx disait bien que l’économie était l’instance dominante « en dernière instance», reconnaissant de ce fait la possible et relative autonomie des différentes instances. Partant de l’exemple du second empire, il reconnaissait que l’Etat peut parfois jouir d’une autonomie relative par rapport aux classes (du moins un certain temps dirait Fernand Raynaud, notamment dans les périodes de transition).

Cela pose non pas la question de savoir quelle instance prime sur l’autre mais celle de leur articulation. Plusieurs schémas ont été proposés en sciences sociales pour comprendre de l’articulation complexe entre ces niveaux de réalité. Il y a ceux qui proposent comme on vient de le voir (certains exégètes) un rapport hiérarchique et mécanique et à l’opposé ceux qui proposent un modèle plus complexe et dynamique. Chacune conserve sa logique et ses contraintes propres de sorte que ce rapport peut s’inverser, connaître des décalages et être déformé. N. Poulantzas note par exemple que dans certaines périodes données, l’instance politique peut dominer et déterminer l’instance économique par opposition aux sociétés modernes où c’est plutôt l’inverse qui existe.

Des rapports complexes et dynamiques

Toutes ces réflexions montrent que les rapports qui unissent les différents ordres de réalité ne sont ni simples, ni univoques et déterministes, ce qui est visible également dans les décalages de temporalités. C’est pourquoi le schéma de Marx entre infra et superstructure peut être vu non comme un dogme mais comme un modèle, un idéal-type comme le dirait Weber plus destiné à faciliter la compréhension d’une réalité complexe qu’un simple rapport mécanique. Il n’y a pas de loi de l’histoire. On pense par exemple à M. Weber qui analyse les rapports entre l’éthique protestante et l’esprit du capitalisme non en termes de causalité dans un sens comme dans l’autre mais en termes de corrélations. Il refuse que le fait religieux ait créé le capitalisme tout autant que ce dernier ait à lui tout seul changé la religion comme superstructure. 


Photo © B.Lhoumeau

La sociologie a bien montré que la réalité sociale ne peut être appréhendée comme la simple addition de psychologies individuelles. Les interactions humaines créent un autre ordre de réalité qui a sa logique propre, sans nier pour autant la réalité psychologique individuelle. Comme le disait E. Morin, un système est plus et moins à la fois que l’addition des individus qui les composent. Ce qui compte, ce sont moins les composantes que les rapports entre elles dont naissent ce qu’il appelle des propriétés émergentes. En sociologie 2+2 ne font pas quatre. A peine deux personnes entrent elles en relation que cela crée un phénomène qui les dépasse et dont la maîtrise est problématique. Il n’est qu’à voir les problèmes de communication. On doit rejeter tout déterminisme voulant que le niveau macro ou microsocial soient déterminants, à savoir la société d’un côté et l’individu de l’autre. Tout le monde sait qu’en économie comme ailleurs, ce qui est logique au plan individuel peut s’avérer irrationnel au plan collectif et vice-versa. Il existe donc plusieurs ordres de rationalité qui font que contrairement au rationalisme universel, la rationalité quelque part peut générer à un autre niveau de l’irrationalité (qui a sa rationalité).

L’individualisme méthodologique de R. Boudon tout comme la sociologie de la décision ont largement traité de la question des effets pervers, non voulus par les individus mais nés de leurs relations. N. Elias a pour sa part noté l’existence de configurations à plusieurs étages où les individus ne peuvent appréhender l’impact de leurs décisions sur d’autres individus dans un système interdépendant en raison de la longueur et de la complexité des chaînes d’interaction, sans oublier H. Simon pour qui un individu ne peut disposer de l’information nécessaires à une décision, appréhender et comparer toutes les possibilités de choix parce qu’il est confronté à un système social interactif et collectif.  La psychologie sociale est née de cette volonté d’éviter ce déterminisme en cherchant à intégrer les phénomènes d’ordre individuel (psychologique) et collectif (social), se cantonnant souvent dans l’étude des phénomènes de niveau intermédiaire ou mésosocial, à savoir les comportements des groupes. Le schéma devient alors plus complexe car on a plus seulement deux niveaux mais trois avec chacun leur propre logique. L’étude des phénomènes sociaux devient dès lors très complexe, plus complexe que ce que laissait croire les modèles mécaniques. Les théories interactionnistes comme par exemple la théorie des jeux ou la sociologie des organisations ont aussi cherché à intégrer dans des modèles sophistiqués mobilisant les concepts, de pouvoir de rationalité, d’intérêt, de stratégie, de systèmes d’action concrets,  les différents ordres de réalité, individuel, collectif, psychologique , sociologique et politique.

Crise et repli sociologique

Le néo-libéralisme et la crise ont amené les sciences sociales, du moins certaines, à critiquer une sociologie trop macro à la recherche d’explications dites « holistes » cherchant à expliquer les phénomènes à travers le long-terme, les grands acteurs, les formations sociales, les idéologies, l’histoire ou encore les structures. Elles se sont repliées sur l’individu ou du moins réinterrogé l’individu, ses affects, ses désirs, son identité, le sens, le court-terme et le quotidien. On a vu par exemple la psychanalyse être mobilisée dans l’étude des organisations et des institutions. On redécouvre des auteurs comme G. Tarde ou G. Le Bon souvent restés en France du moins, dans l’ombre de Durkheim. Ce retour de balancier a eu au moins le mérite de nous interroger, au lieu de la rejeter, sur cette importante question de l’articulation des différents niveaux de la réalité sociale, question qui doit faire partie du programme des sciences sociales mais qui est difficile. Il faut mobiliser les apports conceptuels des différentes disciplines, chacune s’intéressant à un ordre de réalité, ce qui exige une certaine prudence mais démontre toute la relativité des frontières disciplinaires mais aussi l’apport original de chacune en raison de son découpage de la réalité sociale. C’est ainsi que deux résultats peuvent être vrais et contradictoires à la fois. La psychologie sociale, la psychologie politique, la psychanalyse des organisations ou la sociologie des organisations sont des tentatives d’articulation de ces savoirs. Elles nous aidant à mieux comprendre la réalité sociale. Notons au passage que la redécouverte ou le repli sur le niveau micro est à mettre en rapport avec le niveau macro, à savoir les changements intervenus avec la crise de l’Etat-providence.

Nous pensons qu’il est possible de sauver le concept en s’interrogeant sur l’articulation des différents niveaux de réalité sociale à travers lesquels s’expriment les phénomènes culturels, ce qui permet de n’en rejeter aucun et encore moins d’en réserver l’étude à une discipline, même si certaines ont une longueur d’avance. Si l’étude des phénomènes culturels mobilise différents regards ou disciplines, c’est bien qu’ils collent bien ensemble à la complexité de la réalité culturelle humaine.

Notre propos n’est pas d’apporter une explication définitive sur les rapports entre les échelles sociales et culturelles mais de souligner l’apport de deux théoriciens : D. Desjeux et Y. Bertrand susceptibles de jeter quelque éclairage sur la question.

Deux propositions sur l’articulation macro-micro.

Sans vouloir boucler la question, nous allons examiner ici deux approches ou plutôt deux propositions concernant l’articulation des niveaux micro et macro concernant la culture, celui de Desjeux et celui de Y. Bertrand.

L’approche de Desjeux

D. Desjeux montre toute la complexité du projet car selon la focale ou l’échelle d’observation choisie, la réalité observée change, les points de repère se transforment, la question de la rationalité évolue tout comme le statut des variables. Il note que toutes les disciplines des sciences sociales sont concernées par cette question des échelles d’observation. L’auteur retient trois grandes échelles d’observation : macro-sociale, micro-sociale, micro-individuelle.


Les échelles de réalité sociale

L’approche de Desjeux
D. Desjeux montre toute la complexité du projet car selon la focale ou l’échelle d’observation choisie, la réalité observée change, les points de repère se transforment, la question de la rationalité évolue tout comme le statut des variables. Il note que toutes les disciplines des sciences sociales sont concernées par cette question des échelles d’observation. L’auteur retient trois grandes échelles d’observation : macro-sociale, micro-sociale, micro-individuelle.

Graphique 1 : Les échelles de réalité sociale

L’échelle macro-sociale, la plus large est celle des régularités, des grandes tendances, des appartenances sociales et des valeurs., des classes sociales, de la culture.  C’est pourquoi les acteurs individuels y sont peu visibles.

L’échelle micro-sociale, nécessairement plus étroite concerne les acteurs sociaux en interaction les uns avec les autres, au niveau méso (organisations, entreprises, systèmes d’action) ou micro (quotidien, rites d’interaction). Les acteurs apparaissent cette fois pris dans des jeux sociaux mêlant les aspects symboliques, matériels et stratégies.

L’échelle micro-individuelle, encore plus restreinte est celle du sujet, de l’agent, de l’individu dans ses dimensions psychosociale, cognitive ou inconsciente.

Logiques et niveaux de réalité

Ces réflexions sur les échelles d’observations, les niveaux de réalité sociale et leur articulation  nous apparaissent indispensables si on veut échapper aux inconvénients d’un concept de culture trop abstrait ou trop large. On ne peut remettre en question l’économie ou la sociologie sous prétexte que leurs théories ne se vérifient pas dans chaque cas spécifique au plan de la réalité quotidienne. Il serait tout aussi stupide de les remettre en question ces sciences comme ce fut le cas dans le passé, sous prétexte que les études empiriques sont fausses pour des raisons de carences théoriques. C’est un faux problème car tout dépend des échelles d’observations.

Le champ de la culture est vaste et comprend des recherches variées portant sur différentes échelles (temps, territoires, groupes, individus, paradigmes). La richesse des résultats parfois contradictoires démontre à quel point on fait face à un phénomène riche et complexe nécessitant l’apport des différentes disciplines des sciences sociales mais également leur synthèse et articulation en tant que productions elles-mêmes culturelles. Ceux qui prétendent expliquer cet ordre de phénomène y baignent eux-mêmes. Quel regard porter sur la culture, phénomène humain et social dans lequel on s’inscrit et dont on est producteur tant individuellement que collectivement ? Est-on, contraint nécessairement à un point de vue culturel sur la culture ?

Aujourd’hui tout est culture, culture individuelle, culture personnelle, avoir de la culture, culture sociale, organisationnelle, d’entreprise, ethnique, nationale etc. de sorte que le concept semble se dissoudre dans celui d’identité ou de pratique collective. Dès lors qu’il y a différence, il y a culture. Le concept se trouve donc écartelé entre deux extrêmes, entre l’universel et le particulier : être trop abstrait et général et tout expliquer ou être trop concret, éclaté, particulariste et ne plus rien expliquer. Il y a la culture et les cultures. Il y a dans la culture de manière paradoxale partage et différenciation.

Le cas de la Culture organisationnelle

La question des niveaux culturels se pose particulièrement dans l’étude des organisations  entre une approche institutionnaliste qui en fait des produits d’une société y ayant des fonctions précises comme la socialisation et la régulation et une sociologie qui en fait des entités autonomes avec leur histoire et leur système d’action particulier chaque fois différent.

Pour plusieurs théoriciens, les organisations et les entreprises sont en effet devenues, suite à la crise de l’Etat, l’Eglise ou la famille incapables d’assurer leur fonction de régulation, des institutions à part entière. Elles sont chargées au-delà de leur fonction explicite de production, de fonctions de socialisation et d’intégration et de régulation sociale. C’est pourquoi certains réfutent les prétentions universalistes des méthodes de gestion  valables en tout lieu et en tout temps car l’insertion des organisations dans leur environnement les amène à subir leur influence, soit son histoire, ses valeurs, sa hiérarchie sociale. C’est par exemple le cas des travaux de M. Crozier première mouture ou d’Iribarne. D’autres, on l’a dit, refusent de considérer que les organisations puissent se contenter de reproduire mécaniquement la culture de leur environnement. Elle possèdent leur propre culture et de ce fait concourent à la transformation de leur environnement. Ce fut le cas avec la Révolution industrielle qui a eu de très fortes répercussions au plan culturel global. On refuse aussi de les considérer comme des ensemble complètement intégrés. Si certes, leur histoire et leur spécificité leur donne une coloration particulière, l’organisation du travail et la mondialisation en font des ensembles culturellement diversifiés. Les organisations sont dès lors des mosaïques culturelles. Il y a autant de cultures que de niveaux hiérarchiques, de métiers ou d’ateliers, ce qui remet en cause des notions comme celles de projet ou de culture d’entreprise. La culture est moins une solution qu’un problème. On peut dès lors dire que les débats qui agitent les sociétés à propos de la culture se retrouve au cœur même des organisations.

Aires ou spécificités culturelles

  Plusieurs auteurs ont proposé des réflexions sur ce point. Les travaux d’Hofstede sur les différences culturelles dans le management proposent d’articuler le niveau macro et micro. Il cherche à comprendre les effets de programmation culturelle de type macro sociaux au niveau microsocial. Malgré la mondialisation, la diversité des cultures nationales continue de faire sentir ses effets dans la gestion des entreprises. Dans les pays latins, musulmans et d’Afrique noire, la distance hiérarchique prédomine par opposition aux pays scandinaves.  On retrouve là selon Desjeux les grandes aires culturelles chères à Huntington qui se différencient autour de quatre variables exprimant des valeurs culturelles : la distance hiérarchique, le contrôle de l’incertitude, l’individualisme et le rapport à la masculinité. Si cette approche permet dit Desjeux une analyse des macro représentations et des différences perçues entre système de valeurs, elle survalorise l’identité à l’intérieur d’une même aire culturelle et l’altérité vis-à-vis de l’extérieur. Par contre, on retrouve à une échelle plus petite dans chaque aire de nombreux problèmes de frontières. Si on change d’échelle dans une aire culturelle, on retrouve une variété plus forte des cultures, ce qui est vrai pour les sociétés et les organisations.

Au plan macrosocial, on cherche à établir une causalité entre la culture au sens large et les comportements. M. Weber, à travers l’étude de l’éthique protestante et l’esprit du capitalisme, le micro explique le macro, les idées devenant des forces historiques efficaces, pour devenir des motivations psychologiques. l’éthos calviniste expliquant les comportements individuels des entrepreneurs protestants capitalistes du XVIe s. P. Bourdieu fait de même avec son concept d’habitus, Les protestants ont montré une disposition toute spéciale pour le rationalisme économique, la pratique de l’ascèse et la croyance en la prédestination étant les explications. Il a fait à la religion et aux valeurs pour expliquer des comportements économiques. Les valeurs ressortent sous forme d’activité économique spécifique, l’organisation capitaliste rationnelle du travail. C’est la coïncidence qu’il note du moins au début de son analyse.

Plusieurs auteurs ont postulé une relation de causalité entre culture et comportements  humains et Desjeux rappelle fort pertinemment qu’elle comporte des risques : elle peut servir à conforter des stéréotypes, être utilisé idéologiquement. Pour lui, la culture n’est pas une explication en soi et encore moins une essence éternelle mais une ressource mobilisable en fonction des situations historiques.

Les niveaux culturels

Desjeux note à ce propos qu’aucun découpage n’est plus vrai qu’un autre mais devient pertinent selon la question posée, le problème à résoudre et le niveau de précision dont les acteurs ont besoin pour comprendre et agir. Il faut éviter deux confusions : entre petit et précis, le macro étant précis à son échelle, entre macro et compréhension globale, le micro étant aussi global à son échelle.

Il conclut que la question des échelles est le problème du lien entre valeur et action, entre représentation et pratique, entre culture et comportement.

Graphique 1 : La question des échelles d’observation

Echelles d’observations de la culture

Valeur

Action

Représentation

Pratique

Culture

Comportement

L’approche de Bertrand

Il existe avons-nous dit plusieurs propositions quand à l’articulation des niveaux ou échelles de réalité au plan culturel. Parmi celles-ci, il faut d’abord citer ceux de Y. Bertrand cantonnés à la culture organisationnelle mais qui vaut aussi pour l’ensemble de la société.

Il note que plusieurs auteurs ont tenté de sérier par niveaux les nombreux phénomènes d’ordre culturel. Il cite également Hofstede qui propose 4 niveaux :

Graphique 2 : Niveaux culturels selon Hofstede

  1. Valeurs

Cœur de la culture

  1. Rituels

Activités collectives socialement nécessaires

Pratiques

  1. Héros

Personnes vivantes ou mortes, réelles ou imaginaires possédant des attributs fortement valorisés dans une culture et servant de modèles

  1. Symboles/Sens

Mots, gestes, images, objets

Schein retient pour sa part 3 niveaux :

Graphique 3 : Niveaux culturels selon Schein

1. CROYANCES et PRESUPPOSES

Présupposés, règles, orientations de base, credo (paradigme culturel)

2. VALEURS

Description de ce qu’il faut faire, dire et penser

3. PRODUITS et CREATIONS

Productions artistiques, technologie, langage, organisation physique de l’espace.

Myrsiades et Mumby en retiennent également trois :

Graphique 4 : Niveaux culturels selon Myrsiades

1. Ethos

 Vision du monde

2.  Culture

 

3.  Histoires et mythes

 

Graphique 5 : Niveaux culturels selon Mumby

1. Structures de surface

Symboles, actions, demandes

2. Règles transformationnelles

Idéologies

3. Infrastructure

Intérêts des groupes, conditions économiques, technologie

Bertand retient donc en synthèse une division en trois niveaux :

Perceptions des rôles, relations de pouvoir, rêves, fantasmes, désirsinassouvis, frustrations
Idéologies, explications, politiques, cartes cognitives, stratégies, modèles, objectifs
Opérations, mises en application, manifestations, produits culturels (rites, symboles, fêtes, initiations, histoires, slogans, discours)

Graphique 6 : Architecture culturelle selon Bertrand

Opérations, mises en application, manifestations, produits culturels (rites, symboles, fêtes, initiations, histoires, slogans, discours)

Idéologies, explications, politiques, cartes cognitives, stratégies, modèles, objectifs

Perceptions des rôles, relations de pouvoir, rêves, fantasmes, désirsinassouvis, frustration

De manière plus précise, Bertrand retient le tableau suivant des niveaux de la culture :

Graphique 7 : Architecture culturelle selon Bertrand

VALEURS

Structural fondationnel

Valeurs, axiomes, jugements, relations de pouvoir, division en classes, intérêts, fantasmes, désirs

STRATEGIES

Stratégique intermédiaire

Systématisation

Médiation

Idéologies, cartes cognitives, théories, modèles, philosophies, stratégies, objectifs, buts, politiques

FAITS

Démonstratif Applications

Discours, métaphores, rites, histoires, légendes, slogans, rumeurs, règles, fêtes, prix, climat, formulaires, tactiques

Les niveaux culturels chez Y Bertrand

Pour Bertrand, le niveau des Valeurs au sens large sert à constituer les deux autres, se cache derrière les idéologies, stratégies et produits. C’est tout ce qui sert à fonder implicitement ou explicitement les choix et les actions d’un groupe. Il se passe d’explication. C’est un élément majeur des comportements

Le niveau stratégique plus organisé comprend tout ce qui s’appelle regroupement stratégique de valeurs et de jugements, toute forme de systématisation de ce qui se trouve au premier niveau. Il se caractérise par une plus grande explicitation des liens entre les éléments du premier niveau. C’est le niveau des liens, connexions et relations entre éléments. A ce niveau, les valeurs sont regroupées en stratégies, idéologies, cartes cognitives, philosophies qui vont organiser la culture, l’ordonner, la mettre en cohérence dans l’action, créer du sens. La stratégie est caractérisée par sa dimension intentionnelle et volontaire car elle a un but et un objectif, travaille dans un sens déterminé à l’avance. Elles se fondent sur une définition de la philosophie (buts et objectifs). Elles sont utilisées dans le cadre formel et informel des relations de pouvoir. Elles sont des ensembles de comportements habituels et stables des uns et des autres en vue de préserver et renforcer ses intérêts tels qu’on se les représente. Ce niveau a une fonction de médiation assurant le passage dans un sens comme dans l’autre du niveau 1 au niveau 3.

Le dernier niveau est plus visible et est celui de la communication. C’est le monde de l’apparence, de la concrétisation.  C’est la culture traduite dans des faits concrets. Les valeurs sont aussi transmises aussi par des moyens plus souples et moins formels comme les histoires, légendes, mythes, métaphores, rites. Elle comprend les phénomènes de communication c’est-à-dire un ensemble de moyens utilisés pour influencer autrui et reconnus comme tels par celui qu’on veut influencer. Elles sont un pont entre les membres d’une société et ses gouvernants. Ces manifestations jouent un rôle important pour communiquer à qui de droit les intentions d’un groupe ou d’une personne qui détient un certain pouvoir. Il se situe donc à la frontière des besoins des uns et des autres.

Le niveau intermédiaire

Ce qu’il y a d’intéressant dans l’analyse de Bertrand c’est l’existence d’un niveau intermédiaire entre le macro (valeurs) et les faits (micro) qui sert de médiation. On est loin d’une relation purement mécanique les valeurs étant mises en cohérence pour pouvoir agir stratégiquement et s’inscrire dans les pratiques.

Schein traite également de l’articulation des niveaux. Par exemple une valeur une fois prise pour acquise et allant de soi passe au niveau des croyances. Une solution à un problème devenant un modèle déterminant la façon de faire les choses devient aussi une croyance.

Bertrand montre bien que son modèle loin d’être statique est dynamique. Si comme Desjeux il cherche à repérer des niveaux de réalité en proposant un modèle à 3 étages et comme lui, tente d’analyser le fonctionnement et la logique de chacun, il va plus loin en cherchant à comprendre les rapports entre ces niveaux. A ce titre, il a de manière originale mis en évidence le rôle médiateur du niveau intermédiaire stratégique entre le macro (valeurs) et le micro (les pratiques). Les deux auteurs montrent à l’encontre du culturalisme que la culture est un phénomène dynamique en raison de la dialectique existant entre les trois niveaux. Pour Bertrand, la culture est un processus dynamique. Il parle d’ailleurs de dynamique sociocognitive. La culture est à la fois un input d’un processus et le résultat d’une dynamique.

Les boucles cognitivo-culturelles

Il existe entre les trois niveaux des boucles. La culture est une conséquence des perceptions des actions qui à leur tour orientent les perceptions, les jugements et actions subséquentes.

Graphique 8 Bouclage culturel :

Les boucles portent sur 3 domaines : Valeurs, stratégies faits.

Graphique 9 :Culture et dynamique cognitive

CONTENU DE LA CULTURE

NIVEAU DE LA DYNAMIQUE COGNITIVE

PROCESSUS COGNITIF

Valeurs images, fantasmes

Normatif

Clarification des valeurs, recherches philosophiques, connaissance de l’inconscient

Idéologies, cartes cognitives, stratégies, théories

Stratégique

Analyse stratégique, études prospectives, débats politiques

Symboles, manifestations, histoires

Opérationnel

Traitement de l’information, mémorisation, acquisition des connaissances, actions, routines

Le niveau normatif porte sur les processus de traitement de l’information et de l’apprentissage

Elle est de l’ordre de la définition des règles du jeu et porte sur les valeurs et principes des actions en cours. Pour Argyris, c’est l’apprentissage en boucle double car l’attention porte sur les normes, prémisses et valeurs, croyances, principes, axiomes, a priori, cadre de référence, paradigmes. . Elle concerne le savoir-être (valeurs privilégiées par l’organisation, comportements). Par exemple dit Bertrand, la culture hiérarchique qui empêche de passer à un modèle participatif tant son influence est grande en raison de la socialisation subie par les individus. La culture organisationnelle repose sur le fait que chaque membre se fait une représentation, une image de son activité au sein de l’organisation et de ce qu’est l’organisation.

La dynamique stratégique porte sur les cartes cognitives, idéologies et stratégies

Elle se caractérise par la construction continuelle de cartes stratégiques et d’idéologies pour cimenter un groupe, orienter les énergies vers des buts ou attaquer un autre groupe. L’organisation est la somme évolutive et imprévisible de plusieurs stratégies individuelles et collectives souvent conflictuelles. La stratégie culturelle cherche à structurer et normaliser par des stratégies, idéologies et modèles de fonctionnement les relations entre personnes, groupes et organisations. Elle est un système d’action collective caractérisé par des luttes de pouvoir qui génèrent des stratégies conflictuelles qui parviennent à un certain état d’équilibre. Les stratégies visent à structurer les relations entre ses membres. Elles sont constamment réévaluées et ajustées en fonction de celles des autres individus et groupes. Les objectifs supérieurs de l’organisation elles ont pour fonction de fournir une boussole, à orienter les employés dans la bonne direction. C’est pour Waterman, Athos et Peters, le cœur de la culture organisationnelle car assurant la cohésion. Il existe cependant des conflits entre les différents objectifs, d’où l’existence de phénomènes politiques.

La dynamique opérationnelle porte sur les opérations, routines, histoires.

C’est le niveau des savoirs, des technologies, des connaissances pratiques, des informations culturelles élémentaires nécessaires pour survivre dans l’organisation. Cette dynamique correspond au phénomène de l’adaptation en boucle simple, de la correction, de la formation d’habitudes et de l’acquisition de routines et de la rétroaction. C’est à ce niveau que les organisations apprennent à acquérir des compétences pour résoudre des problèmes spécifiques et simples, connaissances accumulées et transmises à leurs membres (comment elles fonctionnent).

Le concept d’énaction

Bertrand attire notre attention sur un concept important dans la compréhension de l’articulation entre les niveaux, celui d’énaction. Les routines en sont un  bon exemple. C’est un processus selon lequel nous déterminons en partie et structurons nos réalités. C’est un processus d’accomplissement de la réalité en vertu duquel on crée et recrée le monde dans lequel on vit. Weick parle de causalité circulaire entre pensée et action. L’action peut créer la pensée qui créera l’action. Par exemple, dans une organisation, une action simplifiante créera des pensées simplifiantes qui créent de nouvelles contraintes sur l’action en se transformant en modèles d’action. C’est le cas de la routinisation qui permet de ne pas toujours penser avant d’agir. Dans l’organisation, une somme d’actions alimentent la pensée et vice-versa. Il y a création de patterns face à l’environnement.

Graphique 10 : L’ Enaction

Donc conclue Bertrand, la culture n’est pas un phénomène statique et la dynamique cognitive culturelle est fonction des conséquences positives ou négatives des actions des uns et des autres. Pour lui, l’observation des phénomènes cognitifs, individuels et organisationnels permet de constater une rencontre des dynamiques qui ne donne pas toujours  lieu à des mariages heureux. Les conséquences ne sont pas toujours celles prévues et voulues.

Il conclue en disant que l’organisation est en fait un processus de résolution de problèmes. Pour ce faire, on doit recourir à des connaissances portant sur l’environnement, l’organisation, les activités, décisions, relations à entretenir, la structure. Il y a le risque qu’elles s’enlisent dans la routine plutôt que de les remettre en question.

Des dérapages interactifs

Les rapports entre niveaux donne lieu à des effets complexes et imprévisibles. La culture n’est donc pas statique mais un phénomène dynamique du fait des tensions et des écarts continuels entre les trois niveaux. Il l’a démontré à travers la complexité des phénomènes de changement car si les trois étages culturels étaient parfaitement intégrés ou emboîtés, cela n’autoriserait pas le changement. Ce dernier est sans doute possible par ce que chaque niveau culturel a sa logique et ses contraintes propres et parce que leurs rapports n’a rien de mécanique ou linéaire. C’est bien ce qui en fait un phénomène sociologique.  La réalité comme le constatait Simmel est plus mouvante et contradictoire. On a pas à faire un choix philosophique mais à rendre compte de ce qui est et en matière de culture, ce « est » est le produit de relations sociales contingentes.

Je pense à cet exemple lu dernièrement. A l’échelle macrosociale, les valeurs peuvent s’imposer à un individu ou groupe, par exemple les lois du capitalisme qui imposent à une famille maghrébine de vivre dans un appartement HLM dont l’aménagement contraint son mode de vie. Malgré cela, sans pouvoir totalement les remettre en question, cette famille peut opposer à ces contraintes une certaine résistance, s’en accommoder en procédant à une réorganisation de la décoration ou du cadre. Ici aussi l’articulation des niveaux est assez complexe, autant que peut l’être le phénomène de l’acculturation.

L’effet médiateur des situations chez Desjeux

Desjeux conclue également à l’aspect dynamique de la culture. Au plan micro-culturel, l’effet de situation joue un rôle important en raison du jeu des interactions, ce qui rend difficile l’application d’une conception statique de la culture. Desjeux cite l’exemple de la sociologie des organisations de M. Crozier qui a cherché à expliquer le lien entre le fonctionnement de la bureaucratie française et les traits culturels de ce pays de manière à expliquer la résistance au changement : forte incapacité à coopérer positivement liée au système scolaire, non négociation du changement. D’autres études sont venues contredire ce fait. Il est donc difficile d’établir un lien empirique concret entre macro-culture statique et comportements stratégiques des acteurs à l’échelle micro-sociale. D’autres ont préféré analyser la culture dans les organisations en termes identitaires, de ressources ou de jeux stratégiques. Desjeux cite les travaux de S. Chevrier qui montrent l’existence de plusieurs jeux stratégiques possibles de gestion de la situation interculturelle (diplomatique, hiérarchique, laisser-faire).

Desjeux conclue de ces études sur la culture qu’entre le macro et le micro il existe un effet de situation avec des contraintes qui font que la culture peut jouer comme contexte mais pas comme variable explicative indépendante. Il retient également le rôle d’un niveau intermédiaire actif, sorte de passage obligé entre le niveau macro et micro, à savoir l’effet de situation.

Graphique 12 : Rapports macro-micro dans le champs culturel

Donc, si certaines observations sont justes à l’échelle macro-culturelle, leur pertinence explicative faiblit ou disparaît à une autre échelle. J. Foucart note par exemple que pour le niveau micro le contexte est un donné et le macro constitue le contexte mais entre les deux, les interférences sont semi aléatoires. Un contexte donné avec ses déterminants globaux laisse tout de même des degrés de liberté à l’action individuelle ou collective. Celle-ci surgit, dit-il, rarement dans une situation structurée où une seule réaction est compatible.

Le plus souvent, on fait face à des situations à structuration faible qui sont  les plus intéressantes à analyser. On est loin du déterminisme. Il ajoute « Si les contextes globaux déterminent des zones de contrainte, ils promeuvent également des ressources et donc des zones d’autonomie ». On est très près des thèses de Crozier et Friedberg. Comme nous le disions, le lien entre un modèle explicatif macro-culturel et des pratiques micro-sociales n’est pas mécanique. Les valeurs, modèles, habitus ou représentations ne sont pour Desjeux qu’en partie explicatifs des comportements humains. Ils structurent nos comportements certes mais les contraintes matérielles, sociales ou symboliques font que ces modèles ne peuvent s’appliquer tels quels car médiatisés et transformés par les effets de situation. C’est ce qui explique selon lui l’écart entre ce que l’on dit et fait.

Conclusion

L’articulation entre niveaux culturels n’est pas donnée mais reste à travers l’intégration des apports de nombreuses recherches sur la culture, un problème scientifique en soi sur lequel il reste à dégager des hypothèses et les valider. Les querelles d’école rendent compte en fait du degré d’avancement de notre réflexion sur cette articulation. Se pencher sur les pratiques culinaires ou comme Gofmann sur les rites d’interaction face à face ne veut nullement dire que c’est le seul niveau d’études possible ou que des phénomènes plus vastes inscrits dans une temporalité longue n’existent pas, pas plus que ces derniers phénomènes rendent ridicule les études ethno méthodologiques. L’anthropologie aura eu le mérite de nous rappeler que c’est l’articulation entre les deux qui est intéressante. Chacun apporte sa pierre et les nombreux conflits ou oppositions montrent à quel point la réalité sociale et culturelle est complexe.

L’analyse de Bertrand ou celle de Desjeux  concernant les niveaux culturels sont fort intéressantes et témoignent de ce que peut apporter une analyse de leur articulation, de montrer que les conflits entre les tenants de la macro et de la micro culture est un faux problème, s’agissant de points de vue, d ‘éclairages différents qui tout en s’excluant, se complètent. Ce qui est important, c’est donc comme on le fait actuellement en sciences sociales, de s’interroger sur leur dynamique et interaction. C’est en soi un objet sociologique. Il n’y a ni l’individu d’un côté, ni la société de l’autre mais les deux. Il faut tenir les deux bouts de la corde. Comme le dit Desjeux, ce qui est vrai à un niveau, ne l’est pas à un autre et chacun a sa logique propre. En ce sens, les débats qui concernant le champ culturel s’inscrivent dans ceux qui traversent le champ actuel des sciences  sociales, de qui a le mérite de faire avancer la connaissance.  Cela nous interroge en même temps, la culture étant un phénomène humain, sur l’articulation entre les différentes sciences sociales qui l’ont pris pour objet.

Les analyses de Desjeux et de Bertrand ont le mérite de mettre en évidence un fonctionnement par paliers ou interviennent des niveaux intermédiaires, sorte de décodeurs autorisant le passage (obligé) entre niveaux de réalité culturels. Comme on le sait, traduction vaut trahison ou pour parler en termes cybernétiques, cette opération de décodage a un prix, se paie d’une perte d’énergie. Elle  a ses effets propres, qu’il s’agisse de stratégies ou de situations, ce qui peut expliquer certains décalages, d’où une possible historicité. Ils nous rappellent également que dans ces interstices, se niche ce qui est l’objet même de la sociologie, le relationnel. L’articulation entre les niveaux comme l’ont montré Crozier et Friedberg passe non par une mécanique mais par l’épaisseur du relationnel, du social dans toute sa complexité interactive, ses contraintes et sa logique propre. Il y a architecture culturelle certes, mais une architecture vivante construite et déconstruite selon des modalités particulières par les acteurs. Comment la culture au sens large pourrait exister sans s’incarner dans les pratiques concrètes et quotidiennes, au risque de demeurer sinon pure abstraction ou discours ?  Inversement, comment une pratique peut-elle prétendre au rang de culture en restant confinée dans le champ individuel, sans lien aucun avec son époque ? Il est sans doute nécessaire pour y répondre de s’interroger comme le fait le concept d’énaction, sur l’articulation entre pensée et action.

On comprendra qu’il n’existe pas donc un seul mais plusieurs modèles et hypothèses concernant l’articulation de ces niveaux qui ont le mérite ni de diluer, ni de totaliser le concret mais de lui rendre sa richesse et sa pertinence. Le concept ne doit pas abdiquer, ni esquiver la complexité de la réalité ou des réalités dont il entend rendre compte.

Pour Desjeux, la culture est donc à la fois une structure et une dynamique, ce qui rend son analyse difficile. Comme structure elle comprend des éléments stables sur une longue durée historique (invariants anthropologiques) et, comme dynamique, elle est soumise au changement, à la variabilité et la diversité (variations culturelles infinies).

L’approche des échelles d’observation renvoie à une théorie de la connaissance Toutes les généralisations ne peuvent qu’être limitées du fait de leur échelle d’observation de départ et de leurs découpages à cette même échelle. Raisonner en échelle aide à gérer la connaissance et l’action comme tension mais à condition de s’interroger en termes relationnels sur l’articulation de ces échelles à travers les acteurs et leurs systèmes d’action.


Bibliographie :
A. Beitone et al., Culture, chao 13 in : Sciences Sociales, Paris, Sirey, 2e ed., 2000, p 199.
P. Steiner La Sociologie de Durkheim, Paris,La Découverte, coll. Repères, , 3e ed., 2000, p 89
J. Foucart, Sociologie de la souffrance, Bruxelles, De Boeck, coll. Ouvertures sociologiques, 2003, p 50
J. Foucart, Sociologie de la souffrance, op.cit. p 52
D. Desjeux, Les Sciences sociales, Paris, PUF, coll. Que sais-je, 2004, p 5
D. Desjeux, op.cit. p 39-57
Y. Bertrand, Culture organisationnelle, Québec, P.U.Q.-Télé-Université, 1991.
Y. Bertrand, op.cit. p 62
Y. Bertrand, op.cit. p 145
Y. Bertrand, op.cit. p 151
D. Desjeux, op.cit. p 55
J. Foucart, Sociologie de la souffrance , op.cit., p 59.


Màj : 3/10/07 17:28
 
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